Patrick Sänger: Veteranen unter den Severern und frühen Soldatenkaisern. Die Dokumentensammlungen der Veteranen Aelius Sarapommon und Aelius Syrion (= HABES. Heidelberger Althistorische Beiträge und Epigraphische Studien; Bd. 48), Stuttgart: Franz Steiner Verlag 2011, 416 S., 19 Farbtafeln, ISBN 978-3-515-09904-2, EUR 59,00
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Ce livre provient d'une thèse d'université qui doit tout à l'école de papyrologie installée à Vienne, en Autriche, et à l'érudition allemande. Elle constitue une somme qui intéresse davantage la vie quotidienne que la vie militaire proprement dite, mais qui est riche de renseignements et de références. Les notes de bas de page et la bibliographie convaincront aisément le lecteur du niveau de ce travail. L'auteur a voulu publier et commenter deux dossiers de papyrus qui ont été constitués vers la fin du IIe siècle de notre ère et dans la première moitié du IIIe siècle, et son ouvrage peut être divisé en trois parties: une présentation générale des personnages (15-115); l'édition des textes (116-339); des annexes (340-413), plus des photographies des papyrus (14 pl.).
La première partie est consacrée aux vétérans en général, surtout d'après la documentation propre à l'Égypte; ce choix s'explique en partie parce que la documentation fournie par les papyrus est très abondante et qu'aucune région de l'empire n'a fourni de textes plus explicites. Quelques comparaisons (trop ou trop peu) sont néanmoins faites avec d'autres provinces (31-37). En effet, les deux dossiers font connaître deux vétérans, originaires de cette province, qui y ont fait tout leur service dans la IIe légion Traiana fortis et qui y sont restés après avoir obtenu l'honesta missio. Le premier, T. Aelius Sarapammon, avait été porte-enseigne, signifer, et l'autre, Aelius Syron, optio; ils avaient donc appartenu au milieu des sous-officiers. Les papyrus datent de l'extrême fin du IIe et de la première moitié du IIIe siècle, et l'on devine que la constitution antonine de 212 est importante pour les personnages en question et surtout pour leur entourage. Ils ont été découverts à Ankyronon (42); ce site a joué un rôle important dans la vie des personnages bien qu'ils soient attachés l'un à Karanis et l'autre à Philadelphie. Cette introduction générale apporte de nombreuses études de détails, par exemple sur les revenus des soldats, simples gregarii et duplicarii (63-65; voir P. Cosme, Le versement de la prime de congé aux vétérans des légions: quelques hypothèses à partir des mutineries de 14 ap. J.-C., in: Les légions de Rome sous le Haut-Empire, 2000, 699-706). Elle permet d'aborder deux questions très importantes. D'une part, le statut de vétérans leur permettait d'obtenir des privilèges dans le domaine juridique et fiscal (6-93); d'autre part, il avait des implications administratives, par exemple lors du census ou en relation avec les domaines impériaux (94-115).
La deuxième partie de ce livre vise à donner les textes (on aurait pu avoir une comparaison avec Chr. Fischer, Retour sur SB XX 14070. Les affaires de la famille d'un vétéran dans le nome arsinoïte, ZPE, 155, 2006, 200-sv). Chacun d'entre eux est précédé par un commentaire. Le grec est accompagné par une traduction en allemand. Un deuxième commentaire, qui est plus philologique et qui suit le document ligne à ligne, vient juste après. Le dossier de Sarapammon comprend huit textes (123-215), et il s'ouvre sur deux pétitions. Nous aurions aimé savoir si ces pétitions ont quelque rapport avec les gradés appelés petitores (R. Haensch, Veteranus ex beneficairio consularis, equestris militiae petitor, KJ, 34, 2001, 135-139; notre art. à paraître dans les actes du dernier congrès de Lyon sur l'armée romaine). On ne voit pas très clairement ce que demande la première qui s'adresse à l'archidikaste. La deuxième est envoyée au préfet et il y est question d'argent. On y trouve aussi une déclaration sous serment, une déclaration faite lors du census, un bail et de la correspondance privée (celle-ci très fragmentaire, il est vrai). Sur la libération des vétérans, on peut aussi consulter L. Keppie, Legions and veterans, Coll. Mavors, 12, 2000 (Stuttgart), 340 p. et, en dernier lieu, A. Valvo, Veterani ex legionibus instrumentum accipere non solent, Athenaeum, 91, 1, 2003, 173-184. Le dossier de Syron (p. 216-339) est un peu plus épais, puisqu'on y trouve onze textes. Il s'ouvre lui aussi sur des pétitions et il comprend également des baux. La première est trop incomplète pour être bien exploitable (218-219). La deuxième, qui a été écrite pour le préfet d'Égypte, concerne les privilèges des vétérans, et leurs revenus (230-232). Un papyrus mentionne un bail pour des terres qui se trouvent sur des domaines impériaux; c'est Syron qui est le preneur (290). Un autre texte (300-302) mentionne un autre bail concernant le même bien. Mais on y trouve une quittance, de la correspondance officielle, entre employés de l'administration, et de la correspondance privée, avec davantage de renseignements. La correspondance privée contient aussi des références à des affaires de bail et d'argent. On regrette le fait que, à plusieurs reprises, les textes sont trop lacunaires pour pouvoir être complètement exploités.
Les appendices s'ouvrent sur les listes, en particulier de pétitions; et on voit que les vétérans s'adressaient souvent à l'administration militaire; le lien avec l'armée d'active n'était pas totalement coupé (340-342). La bibliographie compte 18 pages d'un texte bien serré elle est suivie par 27 pages d'index et 14 planches de photographies.
Cet ouvrage sera utilisé par les chercheurs qui veulent comprendre la crise du IIIe siècle, l'histoire de l'Égypte et la place des vétérans dans la vie de la province. Ayant dit plus haut tout le bien que nous en pensons, nous ne reviendrons pas là-dessus en conclusion.
Yann Le Bohec