Rezension über:

Silvia Nocentini (a cura di): Il «Dialogo» di Caterina da Siena. Per una nuova edizione critica: filologia, tradizione, teologia (= La Mistica cristiana tra Oriente e Occidente; 36), Firenze: SISMEL. Edizioni del Galluzzo 2023, VIII + 276 S., ISBN 978-88-9290-238-1, EUR 44,00
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Rezension von:
Marie des Anges Cayeux
Pontificia Università S. Tommaso d'Aquino - Angelicum, Roma
Redaktionelle Betreuung:
Ralf Lützelschwab
Empfohlene Zitierweise:
Marie des Anges Cayeux: Rezension von: Silvia Nocentini (a cura di): Il «Dialogo» di Caterina da Siena. Per una nuova edizione critica: filologia, tradizione, teologia, Firenze: SISMEL. Edizioni del Galluzzo 2023, in: sehepunkte 24 (2024), Nr. 7/8 [15.07.2024], URL: https://www.sehepunkte.de
/2024/07/38885.html


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Silvia Nocentini (a cura di): Il «Dialogo» di Caterina da Siena

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À compter des études et des critiques de Fawtier et Canet au début du XXe en France, l'intérêt du monde académique pour la figure et les écrits de Catherine de Sienne ne s'est jamais démenti. Les travaux accomplis depuis lors pour établir des éditions critiques de sa vie et de ses œuvres en témoignent, à partir la publication du premier volume des Lettres par E. Dupré Theseider en 1940 et l'édition améliorée du Dialogue par G. Cavalini en 1968, en passant par les éditions critiques du Processo Castellano en 2012 et de la Legenda maior en 2013.

Plus récemment, en 2023, la magnifique publication du premier volume de l'Epistolario, conduite par l'Istituto Storico Italiano per il Medio Evo (ISIME) à l'instigation des Dominicains de la Province Romaine de Sainte Catherine de Sienne, met à la disposition de tous, chercheurs et autres, l'ensemble de l'appareil critique du texte offert, avec la possibilité d'y accéder par un data base accessible en ligne. Certes, il faudra attendre encore quelques années pour disposer de l'ensemble de l'Épistolaire, mais le travail est en cours et se présente déjà comme la référence par excellence, fondement d'une herméneutique renouvelée de la pensée catherinienne et socle des traductions à venir dans les différentes langues.

Mais qu'en est-il du Dialogue ? Si l'on pouvait être reconnaissant à G. Cavallini de sa publication en 1968, à partir du manuscrit 262 de la Casanatense, il manquait encore une véritable édition critique qui confrontât les différents manuscrits du Livre de Catherine de Sienne afin d'offrir un texte fiable dans sa forme originale, en langue vernaculaire, telle que Catherine l'avait pensé. Noemi Pigini, une jeune chercheuse italienne, s'est attelée avec brio à la tâche et l'édition critique du Dialogue, qu'elle conduit, est attendue pour 2025.

Le volume proposé ici rassemble la dizaine de communications faites au XVIe séminaire d'Histoire et de théologie de la Mystique "Claudio Leonardi" qui s'est tenu à Rome en décembre 2021. Orchestré par l'Institutum Historicum Ordinis Praedicatorum, la Postulation Générale de l'Ordre des Prêcheurs et le Centro Internazionale di studi cateriniani (CISC), les actes du Séminaire ont été publiés en 2023, grâce à la Fondation Ezio Franceschini sous la direction de S. Nocentini.

L'axe principal de ce séminaire était semble-t-il de de croiser les éclairages de l'histoire du texte, l'originalité propre de la prose catherinienne, la diffusion de l'ouvrage mais aussi de faire valoir son acception théologique pour en proposer un état des lieux actuel.

C'est sans conteste les parties dédiées à la philologie, aux traductions et à la diffusion du Dialogue qui font l'intérêt de cette publication autour du remarquable travail de N. Pigini. Chargée comme nous l'avons déjà signalé de l'édition critique du Dialogue, elle a présenté lors de cette rencontre, l'avancement de ses recherches, peu de temps avant de soutenir sa thèse à l'Université de Sienne en 2022. Elle y montre notamment comment elle est parvenue, par une méticuleuse confrontation des nombreux manuscrits, à une reconstruction la plus fidèle possible du texte initial de Catherine.

Non moins intéressante est l'étude de C. Lagomarsini, sur la syntaxe et l'agencement de la prose catherinienne, qui l'amène à considérer le Dialogue comme un discours destiné à être entendu plutôt que lu. Une conclusion qui coïncide parfaitement avec l'origine même de ce Dialogue, pris sous la dictée par trois des secrétaires de Catherine durant ses extases. On pourra toutefois regretter l'inclusion dans la première partie de l'ouvrage dédié au texte (!), d'une contribution atypique d'A. Bartolomei Romagnoli portant sur la théologie de la croix de Catherine de Sienne. Cette étude à partir d'un concept cher au philosophe français René Girard, auteur de La violence et le sacré, se présente en réalité comme une réflexion artificiellement, sinon injustement, appliquée à la vierge de Sienne. Il n'a pas de fondement théologique : aucun déterminisme résultant de la violence n'est envisagé par Catherine dans sa considération de la Croix du Christ, ni même dans la personne du Crucifié lequel, par un libre consentement dans l'union des volontés du Fils et du Père, devient l'offrande par excellence. Le sacrifice du Christ accepté et offert librement, et nullement subi, n'est ni sujet ni objet de violence, sinon de manière accessoire et instrumentale.

La deuxième partie du volume offre un panorama de la diffusion du Livre depuis la fin du XIVe jusqu'au XVIIIe siècle, à travers des traductions d'abord en latin puis en langues vernaculaires tant dans la péninsule italienne que dans les pays avoisinants. Par une minutieuse recherche, S. Nocentini s'est appliquée à dresser l'inventaire des diverses versions latines les plus anciennes de l'ouvrage, au nombre de quatre, dont une a malheureusement disparu. Ainsi, le Livre, pourtant écrit en siennois, avait été rapidement traduit en latin par les cercles catheriniens pour en faciliter à double titre la diffusion. Non seulement les traductions latines devaient permettre de rendre le texte accessible dans des milieux où l'usage du vernaculaire était limité mais elles en facilitaient également la circulation dans des contextes linguistiques divers, faisant du latin un trait d'union entre l'italien de Catherine et les langues des pays voisins.

En effet, la destinée du Dialogue dans les différentes langues vernaculaires ne prendra vie progressivement qu'à partir du XVe siècle, parfois même sous un autre titre, comme ce fut le cas en Angleterre : The Orchered of Syon (1470). La première traduction française entreprise par les frères prêcheurs de la rue Saint Jacques à Paris, à partir de l'édition vénitienne de 1540, remonte, quant à elle, à la deuxième moitié du XVIe siècle. En Espagne, où Catherine était largement connue à travers la diffusion de la Legenda maior de Raymond de Capoue, il faudra attendre la fin du XVIIe (1668), pour trouver une première traduction du Dialogue en castillan. Le comble étant qu'il fallut attendre le début du XVIIIe (1707) pour trouver une édition dans la langue de Catherine : G. Gigli, en ardent défenseur de la langue siennoise face aux prétentions florentines, voulait proposer la prose catherinienne comme modèle de la littérature siennoise et s'occupa d'éditer l'Opera Omnia de la sainte de Sienne.

Force est de constater que la dimension proprement théologique de la troisième partie de l'ouvrage, représente le parent pauvre de cette publication et n'apporte rien de nouveau depuis la proclamation de Catherine de Sienne Docteur de l'Église en 1970. Cette proclamation, fondée en grande partie justement sur la doctrine contenue dans le Dialogue, se présentait pourtant comme un vaste champ à approfondir et plus encore une opportunité donnée à une approche plus théologique, et non seulement mystique, de l'œuvre.

Enfin le mérite de cette publication est sans aucun doute de nous faire attendre, avec plus d'impatience que jamais, l'édition critique tant attendue du Dialogue, pour renouveler l'approche théologique des œuvres du Docteur que Sienne a donné à l'Église universelle.

Marie des Anges Cayeux