Jean-Louis Biget (Hg.): Inquisition et société en pays d'oc (XIIIe et XIVe siècles) (= Collection d'histoire religieuse du Languedoc au Moyen Âge; Vol. 2), Toulouse: Editions Privat 2014, 519 S., ISBN 978-2-7089-3453-5, EUR 29,50
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Pavlína Cermanová / Václav Žůrek (eds.): Books of Knowledge in Late Medieval Europe. Circulation and Reception of Popular Texts, Turnhout: Brepols 2021
Fiona J. Griffiths / Julie Hotchin (eds.): Partners in Spirit. Women, Men, and Religious Life in Germany, 1100-1500, Turnhout: Brepols 2014
Chris Sparks: Heresy, Inquisition and Life Cycle in Medieval Languedoc, Woodbridge / Rochester, NY: Boydell & Brewer 2014
L'inquisition est sans aucun doute l'un des thèmes les plus populaires de l'histoire médiévale mais c'est aussi l'un de ceux sur lequel circulent le plus d'idées reçues. À travers vingt-neuf contributions, ce deuxième volume des collections de Fanjeaux entend justement préciser le fonctionnement de cette structure judiciaire particulière qui a émergé progressivement dans le courant du XIIIe siècle.
Reproduisant des interventions tirées des colloques de Fanjeaux et publiées pour l'essentiel dans les Cahiers de Fanjeaux, ce recueil permet au lecteur non seulement de saisir les aléas historiographiques qui ont marqué un demi-siècle d'histoire de l'inquisition en pays d'Oc, mais il lui donne également accès à des publications éparses et parfois anciennes.
L'ouvrage ne se contente pas de retracer la mise en place de l'institution, ses principes de fonctionnement et ses limites (partie I, 17-110), sa structuration et les crises auxquelles elle dut faire face (Y. Dossat, 101-110 et 417-439). Il met également en évidence les dynamiques qui ont traversé en permanence l'inquisition pendant la durée de son activité en pays d'Oc jusqu'au XIVe siècle (partie V, 415-484), notamment en s'attachant à ses acteurs principaux, les inquisiteurs eux-mêmes (partie II, 111-172) tels que Bernard de Caux (Y. Dossat, 113-123), Bernard Gui (A. Palès-Gobilliard, 125-131, J. Paul 132-153) et Jacques Fournier (J. Paul, 155-172, R. Manselli, 467-474), mais aussi à ses procédures judiciaires (partie III, 173-315) et à ses archives (partie IV, 317-413).
En procédant ainsi à large balayage du sujet, l'ouvrage écorne un certain nombre de clichés encore largement répandus sur l'inquisition - y compris dans les manuels scolaires. Le néophyte y apprend ainsi que les tribunaux inquisitoriaux engagés dans la lutte contre les hérésies, les croyances populaires (J.-L. Biget, 225-238) et toute forme d'hostilité envers l'Église (L. Albarret, 451-465) y compris la conversion au judaïsme (A. Palès-Gobilliard, 475484) n'ont pas recouru aveuglement et systématiquement à la violence. En effet, ils ont bien souvent cherché à articuler deux démarches pensées alors comme complémentaires, la conversion et la répression (R. Manselli, 19-30; P. Henriet, 3139) - même s'il est vrai que c'est cette dernière qui s'est imposée progressivement.
Parallèlement, les auteurs démontrent d'une part que ces tribunaux n'ont pas été sous la coupe réglée des ordres mendiants, comme on le pense généralement - certains évêques des pays d'Oc ont également joué un rôle majeur dans les procédures inquisitoriales (Y. Dossat, 41-59; J.L. Biget, 61-85; L. Albarret 87-100, J. Paul 175-184) - et d'autre part que ces tribunaux n'ont pas sévi de manière permanente, la plupart étant actifs par intermittence (J. Paul, 185-206 et 207-224), tantôt avec le soutien du pouvoir royal capétien, tantôt sans sa complicité (A. Friedlander 279-292).
Pour le lecteur plus averti, les contributions portant sur les sources et leur manipulation constituent de véritables leçons de méthode révélant comment les filtres d'interprétation se chevauchent et se combinent de façon particulièrement complexe (J.L. Biget, 225-238). Tout aussi remarquables sont les travaux menés non plus sur l'inquisition elle-même, mais sur ce qu'elle entend combattre : la dissidence religieuse et l'ancrage - très relatif - des hérétiques dans la société des pays d'Oc (J.-L. Biget, 293-315; J. Paul, 319-331, 333-350 et 351-367; J. Théry, 369-396; D. Laurendeau, 397-413).
Si le volume pèche, c'est par son organisation formelle. En effet, l'ouvrage ne propose ni présentation des auteurs, ni index. De plus, les références précises de chacune des contributions sont présentées de manière déconcertante sous la forme d'une liste à la page 516, alors qu'il aurait été bien plus simple de les trouver en note d'avertissement au début de chaque texte - ce qui, par ailleurs, aurait évité au lecteur une gymnastique fastidieuse de recoupement de cette liste avec le catalogue des Cahiers de Fanjeaux afin de déterminer les dates des différentes publications. Enfin, le volume n'évite pas quelques répétitions d'une contribution à l'autre, défaut propre à ce type de recueil.
Anne-Laure Méril-Bellini delle Stelle